Ajustements pour mieux coller à
la réalité beauceronne de l'adaptation
1. Dans la pièce originale,
les raisons du séjour du Parisien Albert Delpierre
à Bruxelles ne sont évoquées que
très brièvement. Ainsi, M. Beulemans lui
dit que ce n'est tout de même
pas parce que je suis en correspondance avec votre père,
et qu'il m'a demandé pour vous une place dans
mes bureaux pour y apprendre le commerce belge (de la
bière), que vous devez tout flanquer en l'air
(I, 2). Aux yeux du spectateur québécois,
cette seule phrase ne suffirait pas à justifier
le voyage du Parisien Richard de Grandmaison, un voyage
de plus de deux semaines en bateau et en train, de paris
à Sainte-Marie, et à rendre le tout crédible.
J'ai donc dû préciser davantage ces raisons.
2. De plus, l'enjeu de la présence
de Richard en Beauce est plus important que ne l'est
l'enjeu pour M. Delpierre d'envoyer son fils, Albert,
à quelque 250 kilomètres de Paris, car
les dépenses sont plus importantes et le produit
(le sirop d'érable), plus novateur que la bière
belge ne l'était. Aussi, Richard ne peut décider
de quitter la Beauce sur un coup de tête (I, 13)
et Marie, ne peut pousser M. de Grandmaison à
prendre le premier train pour Montréal, puis
le premier bateau pour la France (III, 16). Il a donc
fallu procéder à quelques ajustements
pour rendre le tout crédible dans l'adaptation.
3. Les différences langagières
ont été exploitées, comme dans
la pièce originale, tout en mettant davantage
l'accent sur la difficulté de compréhension
existant entre Beaucerons et Richard, ce qui n'existe
pas vraiment dans la pièce originale, Albert
et les Bruxellois se comprenant relativement bien, si
ce ne sont que quelques expressions de-ci, de-là.
L'apprentissage de la parlure
beauceronne a donc été organisée
dramatiquement, tout comme l'apprentissage de l'accent
français par Marie qui se permet de pèrler
à l'occasion, ce que ne fait pas Suzanne dans
la pièce originale. Ainsi, on peut voir Richard
prendre des notes dans son carnet noir et répéter
certaines prononciations. Marie l'encourage plus clairement
à parler beauceron.
4. Nous avons également
tablé sur les différences de comportement
entre Français et Québécois, ce
qui a ouvert un nouveau champ humoristique qui n'existait
pas dans la pièce originale (ex. baisemain de
M. de Grandmaison à Marie et à Mme
Poulin; galanterie proverbiale des Français et,
par conséquent, de Richard et de son père;
froideur des Français devant une chaleur plus
évidente des Québécois qui collent,
touchent (donnent une grande claque dans le dos à
l'occasion), embrassent plus volontiers et sont plus
familiers; etc.). Mme
Poulin personnifie ce trait de caractère québécois.
5. Le décor de l'Acte
III a été modifié pour éliminer
quelques personnages et ainsi, économiser quelque
peu sur les cachets des acteurs (les membres de la Société
des Brasseurs présents sur scène dans
la pièce originale) tout en permettant de voir
davantage les spectateurs
de l'assemblée générale que sont
M. et Mme Poulin (M. et
Mme Beulemans), M. Cliche
(M. Meulemeester), Marie (Suzanne) et M. de Grandmaison
(M. Delpierre). Un écran est proposé sur
lequel on peut voir les orateurs. Toutefois, le curé,
Adélard et Richard qui prononceront sermon et
discours, se présenteront sur l'avant-scène,
près de la table où se trouvent le président,
le secrétaire et le trésorier.
6. Apparition de M. de Grandmaison.
Il eût été invraisemblable que Marie
ne se doute pas que cet élégant monsieur
avec un accent français très prononcé
ne soit M. de Grandmaison dont l'arrivée était
attendue (III, 16). Si on peut concevoir qu'un Français
puisse passer inaperçu à Bruxelles, dans
une telle situation, il n'en est certainement pas de
même dans l'adaptation. Aussi, ai-je dû
modifier la charmante scène du plateau de bières
qui n'aurait pas été crédible dans
cette adaptation si elle avait été maintenue
telle quelle.
7. Pour différencier
les niveaux de langage des personnages, j'ai fait naître
M. Cliche à Saint-Théophile, village situé
près de Saint-Georges qui se trouve à
une vingtaine de kilomètres de la frontière
américaine. M. Cliche utilise donc des expressions
anglaises; quant à son fils, Adélard,
il prononce certains sons avec un chuintement plus évident,
et répète T'sé,
là à qui mieux mieux; M. Poulin,
colérique, parle très vite dans ses moments
d'irritation, provoquant le désarroi de Richard
qui ne pige que dalle !
Quant à M. Réal Beauregard, il est né
à Montréal, ce qui lui vaut son surnom
de Mon Rial
de Montrial
ou de Monsieur Beaurregârrd.
Il roule les « r »
comme seuls les Montréalais sont capables de
le faire, il prononce fromâge
et dit pôteau.
8. Nous avons éliminé
la visite de Marie et de M. Cliche à l'enfant
d'Adélard et d'Angélique (III, 12 et 13)
qui, à notre avis, n'apporte rien et peut entraîner
une certaine confusion chez le spectateur, car Marie
réapparait seulement après une dizaine
de répliques entre Mme
Poulin et M. Beauregard (III, 14).
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